Deux expositions ont lieu en parallèle à Paris en ce moment. L'une au Musée de la vie romantique propose une contemplation des représentations de la figure de l'héroïne dans la première moitié du XIXe siècle. L'autre au petit Palais offre une rétrospective de l'oeuvre de Boldini, peintre qui gagne à être connu tant son travail dépasse - et est bien plus subtil que - la série de portraits mondains de riches héritières et grandes élégantes en tenue de bal à la fin du siècle. 

Je les ai vues coup sur coup et ai été frappée à nouveau par le sort peu enviable que ce XIXe siècle a réservé aux représentations de la femme dans l'Art. Cette femme du XIXe n'atteint le statut d'héroïne que dans un salut sacrificiel, au prix de sa vie, de sa raison ou de sa liberté. 50 ans plus tard, à l'aube du XXe siècle, elle est a contrario célébrée pour son corps, sa beauté et ce qu'elle offre de divertissant et d'agréable au regard. 

Au début du siècle, elle n'est respectable que dans la mesure où elle demeure inatteignable, éthérée et pure (donc pas d'autre issue que la mort, le couvent ou l'oubli à l'instar des Héloïses, Desdemone, Antigone et autre Juliette...). On repère d'ailleurs dans cette exposition et les différentes oeuvres choisies la prédominance du blanc, du voile, de la mousseline et des transparences évanescentes dans les vêtements revêtus par ces fameuses héroïnes promises à un destin de renonciation et de sacrifice.

A l'aube du XXe siècle, elle n'est plus respectée mais affichée, cantonnée au domaine de la mode, consommée visuellement, avec une pointe de mépris et de cruauté, dans la galerie de portraits de ces femmes du monde qui rivalisent de parure et d'ornements.

A croire que la traversée du siècle n'offre aucune progression, aucune bienveillance et tord à sa guise l'image des femmes, objets de fantasmes ou de caricatures. Même s'il le fait avec talent et prouesses artistiques parfois. Et bien sûr on ne saurait limiter les représentations des femmes au XIXe à ces deux extrêmes... 

Entre ces deux mondes, ces deux époques, il y eut fort heureusement Berthe Morisot et l'émotion qu'elle nous donne à voir, saisissant la mélancolie de ces destins de femmes enfermées dans leur représentations. Il y eut Camille Claudel, criant la rage et le débordement dans ses oeuvres mouvementées et géniales. 


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